Si pour certains retours de concert je me rappelle Berlioz (mutatis mutandis) pleurant son supplice de devoir se remémorer le mauvais concert de la veille avant d’en donner un compte rendu et si pour certaines scènes le désagrément est récurrent, c’est bien l’exact opposé pour les jeudis de Saint-Maclou au point que certains lecteurs pourraient me croire d’un amical parti pris, quand d’autres verraient un éternel acariâtre au lendemain des productions du Théâtre des Arts.
Sans avoir pu suivre toute la saison estivale des jeudis de Saint-Maclou, mais en ayant abondamment écouté La Maison illuminée cette année, quelle que fut sa formation, je me trouve bien en peine de renouveler mon compte rendu de cette dernière de la saison estivale. Une fois ou l’autre j’ai pu souligner tel ou tel bémol, parfois un certain temps avant que l’ensemble ne se trouve tout en trouvant l’acoustique de l’église, ce qui est fréquemment le cas en tout concert. Mais jeudi soir il n’en fut rien. Dès la première note Jean-Baptiste Monnot et Oswald Sallaberger se sont trouvé. Le trio de l’organiste, du violoniste et de l’église était d’une rare unité. Sans flagornerie, nous avons à Rouen des perles et on ne peut que se réjouir de la notoriété grandissante de ces concerts du jeudi.
On dit aujourd’hui que le beau est relatif, alors qu’il est la quintessence de ce qui apaisant l’âme l’élève. Sous des formes et des esthétiques différentes, c’est cette constance que nous offre La Maison Illuminée, au-delà de scories que l’on peut parfois relever. C’est probablement pour cela que le public se fait lui-même musicien à ces occasions. Dans le public on mesure mal combien la partition sans la respiration de la salle perd de son relief ( ce que l’on perçoit à l’écoute d’un simple enregistrement). Le jeu de tension entre les deux pôles centraux de la musique tonale n’a finalement d’autre but que d’agrandir les dimensions de l’orchestre au public et peut-être est-ce là la clef de cette émotion des jeudis de Saint-Maclou. La technique est là bien entendu, mais elle respire et entraine le public dans cette respiration.
J’aurai pu détailler le programme dans son compte rendu, mais au fond de bout en bout je n’aurai dit que cette chose essentielle, de concert nous avons respiré le beau.
La Maison Illuminée, Oswald Sallaberger, Jean-Baptiste Monnot, jeudi 5 septembre – Saint-Maclou, Rouen